Effet pervers du confinement : il réveille les troubles alimentaires

Rester enfermé chez soi à ne rien faire. Tourner en rond ou au contraire, être sous une pression de folie pour le boulot ou par la famille… Eh ben c’est pas bon pour nous. Et le confinement a tendance à réveiller nos névroses et nos angoisses. Du coup, on se rattrape sur la bouffe pour compenser. Dites adieu au ciel bleu et bonjour à vos troubles alimentaires. 

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La pandémie du Covid19 impacte toute le monde, même ceux qui ne sont pas malades. Le confinement nous a poussé dans nos retranchements et fait monter notre stress à un bon degré. Tant et si bien que les personnes sujettes aux troubles alimentaires ont vu ces derniers ressurgir dans leur quotidien, rendant le retour à la normale difficile. Chaque isolement social les rapproche davantage de la limite à ne pas franchir pour ne pas replonger dans leurs vieux démons. 

Et une fois que le confinement sera fini, il faudra ressortir, se réapproprier son corps, acte plus difficile qu’il n’y parait pour certains d’entre nous. 

Si vous avez déjà souffert de troubles alimentaires, il est probable que la routine familiale quotidienne vous ait provoqué un retour de vos mauvaises habitudes. Boulimie, anorexie, phobies, … C’est un effet ressenti par bon nombre de personnes concernées par les troubles de l’alimentation. Près de neuf patients sur dix souffrant de TCA ont déclaré une aggravation pendant le confinement

 

Covid19 et confinement : un mélange explosif 

Le confinement a vraiment mis à mal les personnes fragiles qui s’étaient sorties. Ou qui se sortaient de leurs troubles alimentaires. Aux États-Unis, la National Eating Disorder Association a constaté une augmentation de 78% des messages envoyés à son service d’assistance téléphonique en mars et avril par rapport à la même période l’année dernière. 

De plus, une étude australienne portant sur 5.469 personnes, publiée le mois dernier, a révélé que 64,5% des sondé·es ayant des antécédents de troubles alimentaires ont déclaré limiter davantage leur consommation de nourriture depuis la pandémie. Tandis que 35,5% ont fait état d’une augmentation de leur frénésie alimentaire. 

« Au fond, les comportements alimentaires désordonnés sont des stratégies d’adaptation», analyse Lisa Du Breuil, psychothérapeute qui traite les troubles alimentaires au Massachusetts General Hospital. « Quand nous sommes stressés, nous nous rabattons sur ce qui nous est le plus familier. Nous vivons tous avec cette menace existentielle permanente. Bien sûr, cela va se manifester dans la manière de s’alimenter. » 

« Avant la mise en place du confinement, vous aviez des pauses déjeuner, la journée d’école, l’heure du coucher… Et tous ces autres indices externes qui, autrefois, fournissaient une structure pour les activités de base d’autogestion de la santé », rappelle Ayana Habtermariam, une thérapeute nutritionniste de Virginie. « Les parents doivent maintenant se recréer par eux-mêmes. » 

 

En France, plus de 600.000 adolescents et jeunes adultes, principalement des femmes, souffrent d’un TCA, d’après la Fédération Française Anorexie Boulimie (FFAB). Ils sont de trois types :

  • l’anorexie (restriction alimentaire),
  • la boulimie (des crises de prise alimentaire excessive suivies de mesures de compensation, telles que le sport excessif ou les vomissements)
  • l’hyperphagie (des prises alimentaires excessives sans mesures de compensation).

 

Deuxième effet Kiss Kool 

« Les troubles de l’alimentation se développent dans l’isolement. Car il y a déjà tellement de honte et de stigmatisation que beaucoup de comportements se tiennent en secret », abonde Rachel Millner, thérapeute spécialisée dans les troubles alimentaires. « Lorsque vous êtes littéralement isolé toute la journée et que vous n’avez pas les mêmes possibilités de vous asseoir et de manger avec d’autres personnes, le trouble s’intensifie 

Les spécialistes observent chaque jour de nouvelles demandent d’aide en ligne. L’isolement, l’anxiété, la dépression touchent de plus en plus de monde au fur et à mesure que la pandémie progresse. Et les vieux démons guettent la moindre occasion pour se faufiler dans nos pensées. Mais ce n’est pas tout 

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Une revue récente de la littérature scientifique publiée dans « The Lancet » souligne cependant les risques que cette situation d’enfermement fait courir en matière de développement ou d’aggravation des troubles mentaux à l’issue de cette quarantaine, tant sur le court que sur le long terme. Il existe par exemple un surrisque de trouble de stress post-traumatique, de confusion, et de comportements agressifs.

Parmi les troubles mentaux, les troubles des conduites alimentaires sont parmi les plus fréquents : en population générale, une personne sur 20 est touchée par l’anorexie mentale, la boulimie nerveuse ou l’hyperphagie boulimique.

Les professionnels travaillant dans ce champ ont souligné la vulnérabilité et les spécificités de ces patients vis-à-vis du Covid-19, et plusieurs ressources en ligne sont disponibles à ce sujet. Bien que l’on puisse supposer que le stress induit par la quarantaine contribue au développement d’un trouble des conduites alimentaires ou à son aggravation, les effets sur les troubles psychologiques sont encore mal évalués. Et probablement sous-estimés.

 

Le déconfinement est une nouvelle épreuve

Les personnes souffrant de troubles alimentaires ressentiront probablement un effet à long terme sur leurs symptômes et leur rétablissement. Il est important que cela soit reconnu par les services de santé. Et au-delà ! Afin d’offrir les ressources nécessaires pour soutenir cette population vulnérable maintenant et de façon continue. Le déconfinement est loin d’être la fin des problèmes, est pour ces patients « une nouvelle épreuve ». Les repères nouveaux acquis pendant le confinement sont perdus, les cartes rebattues, les journées restructurées… La peur du regard de l’autre, de son jugement, peut être suffisante pour renforcer les TCA d’une personne souffrante.

 

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