Pour vos problèmes d’addictions, avez-vous pensé à utiliser internet ? On y pense peut-être moins mais de nombreux sites et applis permettent d’améliorer la prévention, le repérage et la prise en charge de ses addictions.
Le rapport » Addictions: la révolution de l’e-Santé « , remis mardi 14 mai, à la Mission interministérielle de lutte contre les drogues (MILDECA) indique que l’e-santé pourrait apporter une solution.
Un constat alarmant
En France, on compte de plus en plus de personnes présentant une addiction. C’est ainsi que 13 millions de français fument quotidiennement, 5 millions boivent de l’alcool tous les jours et que 700 000 sont accro au cannabis. Si on ajoute à cela l’accroissement des déserts médicaux notamment dans les plus petites communes, il apparaît qu’il est de plus en plus difficile pour les patients présentant des addictions de se soigner. Il est d’autant plus difficile de chercher de l’aide auprès du corps médical que ce genre de problème reste tabou.
Selon le professeur Michel Reynaud, président du Fonds Actions Addictions, à l’origine du rapport, « il y a un fossé entre les personnes qui souffrent d’addictions et celles qui sont réellement traitées. C’est ce qu’on appelle le ‘treatment gap’. 80% des gens qui souffrent d’addictions ne trouvent pas de traitement quand ils en ont besoin, car les structures hospitalières sont insuffisantes, les médecins généralistes mal à l’aise avec ce type de patients, et parce que pour les malades, il est difficile de parler ».
Ainsi, la conclusion du rapport est simple : la réponse se trouve sur le web. En effet, 88% des Français ont accès à Internet (attention à la cyberdépendance). Les applis sont également une bonne solution car 73% des Français en possédaient un en 2017.
Développer l’e-santé sur internet
Pour traiter le problème des addictions grâce à internet, il s’agit donc de développer ce que l’on appelle plus généralement l’e-santé. Mais qu’entend-on par e-santé précisément ? Cela va consister à utiliser le web pour répondre à des problématiques médicales. Cela peut se traduire pat le lancement d’applications par exemple ou l’utilisation de la réalité virtuelle pour aider les patients à prendre en charge leurs addictions.
Le rapport encourage donc à développer non seulement des applications, mais aussi des plateformes communautaires (ou les visiteurs peuvent échanger sur leurs expériences et trouver des réponses à leurs questions en s’appuyant sur la communauté). Cela existe déjà dans plusieurs pays comme en Angleterre par exemple où le site de l’organisation caritative Drinkaware a attiré 10 millions de des visiteurs uniques en 2016 dont 28% ont rempli le questionnaire permettant d’autoévaluer ses addictions sur internet.
Des projets déjà en test en France
L’hôpital Paul-Brousse de Villejuif (Val-de-Marne) l’expérimente l’utilisation de la réalité virtuelle depuis trois ans. Grâce à un casque, le patient est plongé pendant plusieurs minutes dans une situation propice à son addiction (que ce soit des bouteilles d’alcool ou un joint qui sont placés bien en évidence autour de lui ou encore un univers de machines à sous pour les joueurs invétérés). L’idée étant de soigner le patient en l’aidant à mieux gérer ses pulsions et donc en déclenchant le « craving » (c’est-à-dire l’envie irrépressible de consommer) tout en le mettant dans une situation sécurisée puisqu’entièrement virtuelle…
Il existe également de nombreux sites dédiés aux addictions en France mais il est difficile de connaître avec précision leur nombre et leur fréquentation. A cela s’ajoute une myriade d’applications mobiles dédiées à la santé et au bien-être (sans doute plus de 200.000) mais qui ont une durée de vie assez courte. En 2013, 80% des applications santé étaient téléchargées moins de 500 fois, pour une durée moyenne d’utilisation de deux semaines.
Le problème de la confidentialité et de la sécurité des données sur internet
Il faut toutefois rester vigilant quant à l’utilisation du web et notamment des réseaux sociaux qui présente des dérives. En effet le Fonds Actions Addictions indique des pratiques commerciales abusives ont été récemment dévoilées dans le champ des addictions et comprennent notamment : le rabattage de patients vers des centres, les sites web prédateurs, la promotion d’analyse d’urine, la surfacturation des actes, la capture de clientèle auprès d’assureurs et de réseaux de soins établis, la fausse publicité, et la revente d’informations personnelles.
Le deuxième souci (de taille) est qu’il serait nécessaire de collecter des données pertinentes sur l’usager afin d’être vraiment efficace. « Ce qui pose plus de problème, c’est la confidentialité de ces données », prévient Michel Reynaud.
« Ce qu’on demande, c’est la mise en place d’un plan avec des moyens financiers, qui permettraient justement de mettre en place des plateformes sécurisées pour les utilisateurs. Il faut que la ministre de la Santé intègre ces mesures dans son plan de développement de la e-santé ».
Des applis pour les petites et grosses dépendances
Il existe d’ores et déjà des applis pour gérer vos addictions. En voici 5 exemples.
L’Inpes (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé) propose une appli pour nous convaincre d’arrêter de fumer. Après un court questionnaire, elle propose un coaching personnalisé avec des conseils et des exercices de relaxation en vidéo. Vous pourrez également partager vos petites victoires sur les réseaux sociaux et contacter gratuitement un tabacologue.
L’appli Moment s’est donné pour mission de nous aider à décrocher de notre écran de smartphone. Elle surveille notre addiction au portable en indiquant le temps que l’on passe dessus et le nombre de sessions. En anglais.
Plus généraliste, cette appli s’attaque à nos addictions au quotidien : jeux vidéo, cigarette ou e-cigarette, alcool, sport… En entrant la date, à quel moment on a craqué et l’émotion ressentie à ce moment précis, on va pouvoir décortiquer certains éléments déclencheurs.
Cette appli, mise au point par la faculté de médecine de Genève, vous aidera à mieux évaluer votre consommation d’alcool ainsi que les raisons qui vous poussent à boire. Vous pourrez visualiser vos données sous forme de graphique pour une meilleur compréhension.
L’appli MyFitnessPal vous permet de chiffrer le nombre de calories de vos petits craquages sucrés. Entrez la quantité d’un produit consommé ou son code barre directement pour suivre votre consommation de près.
On est souvent démunis lorsqu’il s’agit de nos addictions et le web pourrait bien apporter une solution pour tous. Reste à savoir si les applis proposées trouveront des utilisateurs réguliers et sauront respecter la confidentialité et la sécurité de nos données.